Paroles d’une ancienne addicte aux réseaux sociaux

Je regarde mon ancien compte instagram et je ne me reconnais plus. Je me demande comment j’ai pu poster tout ce que j’ai posté. Tout mon compte n’est rien d’autre qu’une mise en scène. Mes vacances, mes soirées, mes copines, mon copain, mes plats, mes achats, mes chats, les restos, sans oublier les quelques photos « artistiques » agrémentées de citations mystérieuses, comme si elles étaient reliées à des réflexions profondes alors qu’elles n’étaient que le simple résultat de mes recherches « citations inspirantes » sur google… Le but, c’était inconsciemment de montrer à quel point ma vie était cool, à quel point je faisais des trucs cool, à quel point j’achetais des trucs cool et à quel point je traînais avec des gens cool.

Je me suis mise à vouloir ce maillot de bain que toutes les filles d’instagram avaient, je voulais moi aussi partir vers des destinations stylées et faire des photos avec des piscines à débordement. J’ai commencé pour la première fois de ma vie à faire attention à mon poids alors que je n’ai jamais été en surpoids et que jusque là je me trouvais très bien comme j’étais, mais je voulais ressembler à ces photos qu’elles montraient. Je ne comprenais pas trop comment on pouvait en arriver à poster des photos de soi en maillot de bain, en petite tenue de sport ou presque à poil publiquement mais je voulais y ressembler. Mon fil d’actualité instagram s’est très vite rempli de filles sportives qui mangeaient sain et dont l’activité principale relevait du shopping.

C’était un peu comme avoir tous les jours quelqu’un qui dès votre réveil vous dit « coucou, tu n’es pas assez bien, fais donc comme moi, va faire du sport et du shopping pour être parfaite ! ». La lycéenne que j’étais était trop absorbée dans la course au conformisme pour me rendre compte de tout ça. Je voulais faire partie de la masse, je me cherchais mais je me suis plus perdue qu’autre chose. Bref, je pourrais faire une longue description de la personne accro aux réseaux sociaux et égocentrique que j’étais parce que je n’ai même pas encore évoqué ici Facebook ou Snapchat, mais je vais me contenter d’essayer de répondre au pourquoi du comment.

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Pourquoi je voulais autant mettre ma vie en scène ? Pourquoi je passais tellement de temps à regarder celle de mes copines ou celle de personnes que je ne connaissais même pas ? Pas besoin d’avoir un doctorat en psychologie pour comprendre que j’avais un gros problème avec mon égo, lui même lié à un problème d’estime de soi. Je ne m’aimais pas assez pour me dire : non, je n’ai pas besoin de ressembler à telle ou telle personne, je suis belle comme je suis. Non, je n’ai pas besoin d’avoir tel ou tel vêtement pour me sentir en confiance et jolie. Non, je n’ai pas besoin de mettre des photos de tout ce que je fais et montrer que je suis heureuse. En faite avec le recul, je suis maintenant convaincue que ce sont les personnes les plus heureuses qui ne postent rien, justement parce qu’elles sont trop occupées à VIVRE cette vie heureuse.

Maintenant que j’ai fait un gros travail sur moi, que je fais de la méditation, que j’ai pris conscience de plein de trucs au niveau de consumérisme etc, je vois bien que je n’étais pas la seule accro aux réseaux sociaux. Je le vois partout autour de moi.
Un exemple récent, celui d’un ami qui me racontait à quel point il était déprimé en ce moment mais qui, 5 minutes plus tard postait une photo de lui entouré de ses amis à une soirée en boîte tout souriant et l’air heureux. J’étais pareil, je comprends. C’est un peu comme si on n’avait pas le droit d’aller mal. Et surtout pas le montrer. On doit paraître forts, heureux, dans tous les domaines.
Un autre exemple, il n’y a pas longtemps j’étais à une soirée et ce qui m’a frappée c’était le comportement des gens. Hop là, on va faire des photos et des vidéos sur snapchat juste pour montrer qu’on est à une soirée, qu’on passe la meilleure de notre vie, alors que deux secondes après on reste tout seul dans son coin à regarder qui regarde ou like notre dernière vidéo postée parce qu’en fait, on s’emmerde bien comme il faut, à cette soirée. J’ai aussi tous ces amis qui dès que je suis avec eux ne peuvent s’empêcher de prendre une photo de tout ce qu’on fait. Hé, et si on passait un moment tous les deux, sans tous tes followers ?

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Meilleure soirée de tous les temps

J’ai l’impression que tout ça, c’est mentir aux autres et se mentir à soi-même. En plus, les réseaux sociaux nous font nous comparer les uns autres  en permanence. Pourtant, on est tous unique. Personne n’a les mêmes gènes, la même histoire, la même personnalité, ni les mêmes goûts. Des comparaisons entre des personnes tellement uniques, ça n’a pas de sens. D’autant plus quand on se compare à cette mise en scène idyllique.

À quoi ça sert de montrer qu’on est en train de faire du sport ? Qu’on vient de se mettre de la crème ? Qu’on vient de s’acheter des nouvelles baskets hors de prix qu’on va même jusqu’à appeler nos « bébé » ? À quoi ça sert de montrer que mon copain vient de m’offrir des fleurs ? Rendre les autres jaloux ? Montrer que notre vie est mieux ? Se rassurer soi-même ? Je ne répondrais pas à ces questions. Je pense que c’est à chacun de se les poser dès qu’il poste quelque chose sur les réseaux sociaux. Non pas parce que moi ça m’énerve de voir des postes comme ça, mais parce que je sais très bien ce qu’il y a derrière et que je pense que tout le monde serait plus heureux s’il se posait ces questions et y répondait honnêtement. 

Attention, je ne suis pas en train de dire qu’il ne faut plus rien poster et j’espère que les gens qui me connaissent ne penseront pas que je juge chacun de leurs faits et gestes sur les réseaux sociaux. Il n’y a rien de mal à poster des choses, il faut juste savoir pourquoi on le fait.

Paradoxalement, ce sont les réseaux sociaux qui ont participé à mon « éveil ». Je suis tombée sur un canadien qui faisait des vidéos sur ce qu’il faisait à son échelle pour participer à protéger l’environnement. J’ai rejoint plusieurs groupes écolo et alternatifs sur Facebook, j’ai découvert pleins de sites et de blogs grâce à eux. Cela m’a clairement fait apparaître le décalage qu’il y avait entre mes vraies convictions/idéaux et ceux que je vivais. On ne peut pas vouloir protéger l’environnement mais en même temps être une parfaite consommatrice. J’ai donc aussi clairement vu que pour pouvoir penser à l’environnement et aux autres, il faut déjà être bien dans sa tête. Il faut s’être déjà bien occupé de soi pour pouvoir s’occuper des autres.

Je me suis naturellement éloigné des réseaux sociaux. Pendant les vacances, deux semaines complètement OFF m’ont fait un bien fou. J’ai définitivement arrêté snapchat… je ne voyais plus l’intérêt de partager ma vie à chaque seconde. J’ai arrêté d’alimenter mon compte instagram personnel et j’ai profité du compte instagram de mon blog pour ne m’abonner qu’à des chaînes inspirantes de bons plats vegan ou de profs de yoga que j’adore et qui délivrent des messages positifs et inspirants. Sur Facebook, idem. Mais surtout je n’y vais plus beaucoup et surtout jamais dès le réveil ou juste avant de m’endormir ! Je me restreint à y aller seulement tous les deux jours ou alors une ou deux fois par jour, même si parfois je m’y perds et que j’y reste plus longtemps que prévu. Bref je cherche un équilibre. D’un côté je n’ai plus envie de perdre mon temps sur les réseaux sociaux mais d’un autre côté j’ai envie de partager ce que j’ai à dire.

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Il n’est pas trop tard pour inverser la tendance !

Je viens de relire tout ce que j’avais écrit jusque là et j’ai l’impression de parler (enfin d’écrire) comme une ancienne alcoolique anonyme, sauf que là je suis une ancienne accro aux réseaux sociaux anonymes. J’ai pas honte, je ne regrette rien mais je suis un peu dépitée. Dépitée, parce que je vois à quel point ces réseaux sociaux peuvent avoir un impact négatif dans la vie des gens en leur faisant croire qu’ils ne sont pas assez bien, pas assez beau, pas assez… tout. Mais mon côté optimiste n’est jamais loin et je vois bien aussi que les réseaux sociaux peuvent être un merveilleux outil de diffusion des idées et d’évolution des moeurs et donc de la société. Encore une fois, je pense que tout est une question d’équilibre et d’honnêteté vis-à-vis de soi-même.

Du love.

2 réflexions au sujet de « Paroles d’une ancienne addicte aux réseaux sociaux »

  1. C’est tellement ça… Je n’en suis pas à ce point là, je ne poste pas des photos à tout va, par contre je le retrouve tout à fait quand tu dis qu’on se retrouve à envier la vie des autres… J’ai fait un article la dessus sur mon blog. Je me suis désabonnée de tous les gros comptes et comme toi je ne laisse que les personnes inspirante ou des petits comptes que j’aime suivre et qui me soutienne, comme des copines ☺️.

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